Denis Lachaud |
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Editions Actes Sud | |
21,80 € | |
Roman
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Terroriste, pensant oeuvrer pour un monde plus juste, Antoine Léon, alias St Just, assassine le Président de la République. Désavoué par le public et par sa femme qui le quitte, il est condamné à perpétuité. Se coupant de l’agitation extérieure, Antoine se replie sur lui-même. Pour se reconstruire, il développe une nouvelle spiritualité qui va l’apaiser et lui faire comprendre l’horreur de son geste. Les seules visites qu’il accepte sont celles de sa petite fille Rosa. À sa sortie en 2037, 20 ans plus tard, ses pires craintes se sont réalisées : crises économiques et énergétiques successives, afflux massif de migrants, banlieues transformées en zones de séjour, privatisation des services publics font désormais partie du paysage français…
Sa fille qui lui restée fidèle va le guider, l’aider à tout réapprendre pour s’adapter à la modernité, et trouver à nouveau sa place dans cette société contre laquelle il a jadis luttée. Elle a hérité du même esprit contestataire que son père, mais le met en oeuvre sans violence. Avec Rosa, Antoine va apprendre à reconnaître la force silencieuse du nombre qui refuse de se reconnaitre dans cette société et se mobilise pacifiquement. Ha ça ira peut au premier abord apparaître comme un livre pessimiste, mais c’est tout le contraire. Rosa, Antoine et tous les autres personnages du roman nous posent en fait la question du passage à l’acte citoyen. Pour Denis Lauchaud comme pour Stéphane Hessel, s’indigner ne suffit pas. Il faut passer de l’indignation à l’action, inventer une nouvelle forme de démocratie. Ha ça ira n’est pas un pamphlet révolutionnaire. C’est un cri d’espoir et de solidarité, la peinture d’une belle rencontre entre un père et sa fille. Bref, un roman profondément humaniste…
“Les bâtiments exigus où s’entassaient de plus en plus d’exilés capturés aux abords des villes ou lors de rafles sur une commune entière ont été détruits ou réaffectés et leurs occupants rassemblés dans ces quartiers de banlieues défavorisées dont on a délogé les habitants. Les barres d’immeubles vides ont été cerclées d’un mur copié sur le modèle séparant les Etats-Unis du Mexique, sa hauteur réglementaire décourageant d’emblée les velléités d’évasion. Ainsi après Nice, Toulouse, Marseille et Lyon, le Grand Paris sur le point de se parachever a vu naître la Zone de Séjour Temporaire n°5, sa première ZeST. Un matin de juillet, les agents de la police nationale ont entassé les résidents des quelques dix-huit centres de rétention d’Ile-de-France dans de vieux bus de la RATP et les ont déversés sous bonne escorte à l’entrée de la nouvelle citadelle.”
” Je suis lasse d’observer sans réagir la dégradation de tout ce qui compose mes conditions de vie mais au-delà de ce constat, je n’aime pas le monde tel qu’il se présente à moi. Et plus le temps passe, moins je l’aime. Je vieillis peut-être. C’est ce que je me dis parfois. On vieillit et on perd ses capacités d’adaptation. Mais cette explication ne me suffit pas. Ce n’est pas de m’éloigner de mon adolescence qui rend intolérable à mes yeux le fait que les cinquante familles les plus riches du monde possèdent autant que la moitié de la population planétaire, ce n’est pas la maturité qui génère en moi la honte quand je vois se construire les Zones de Séjours Temporaires où nous parquons les étrangers. Je veux que le monde change. Profondément. Je l’ai toujours voulu. Depuis que je m’y intéresse.”